Le sable rouge est comme une mer sans limite,
Et qui flambe, muette, affaissée en son lit
Une ondulation immobile remplit
L'horizon aux vapeurs de cuivre où l'homme habite
Nulle vie et nul bruit. Tous les lions repus
Dorment au fond de l'antre éloigné de cent lieues,
Et la girafe boit dans les fontaines bleues,
Là-bas, sous les dattiers des panthères connus.
Pas un oiseau ne passe en fouettant de son aile
L'air épais, où circule un immense soleil.
Parfois quelque boa, chauffé dans son sommeil,
Fait onduler son dos dont l'écaille étincelle
Tel l'espace enflammé brùle sous les cieux clairs,
Mais, tandis que tout dort aux mornes solitudes,
Les éléphants rugueux, voyageurs lents et rudes
Vont aux pays natal à travers les déserts
D'un point de l'horizon, comme des masses brunes,
Ils viennent, soulevant la poussiere, et l'on voit,
Pour ne point dévier du chemin le plus droit,
Sous leur pied large et sùr crouler au loin les dunes
Celui qui tient la tete est un vieux chef. Son corps
Est gercé comme un tronc que le temps ronge et mine
Sa tete est comme un roc, et l'arc de son échine
Se voùte puissamment à ses moindres efforts
Sans ralentir jamais et sans hater sa marche,
Il guide au but certain ses compagnons poudreux;
Et, creusant par derrière un sillon sablonneux,
Les pélerins massifs suivent leur patriarche
L'oreille en éventail, la trompe entre les dents,
Ils cheminent, l'oeil clos. leur ventre bat et fume,
Et leur sueur dans l'air embrasé monte en brume;
Et bourdonnent autour mille insectes ardents
Mais qu'importe la soif et la mouche vorace
Et le soleil cuisant leur dos noir et plissé?
Ils rèvent en marchant du pays délaissé,
Des forets de figuiers où s'abrita leur race
Ils reverront le fleuve échappé des grands monts,
Où nage en mugissant l'hippopotame énorme,
où, blanchis par la lune et projetant leur forme,
Ils descendaient pour boire en écrasant les joncs
Aussi pleins de courage et de lenteur, ils passent
Comme une ligne noire, au sable illimité;
Et le désert reprend son immobilité
Quand les lourds voyageurs à l'horizon s'effacent.
Charles-Marie LECONTE DE L'ISLE
les photos des éléphants font parties de ma collection (160)
Commentaires
bonjour ma douce Princesse,
j'ai adoré ton texte, cela me rappelle l'Afrique et la chaleur.
Le temps est doux et pluvieux, je pense que c'est mieux que la neige.
Très bonne journée.
Je t'embrasse