Comme les larmes d'or qui de mon coeur s'égouttent,
Feuilles de mes bonheurs, vous tombez toutes, toutes
Vous tombez au jardin de rève où je m'en vais,
Où je vais, les cheveux au vent des jours mauvais
Vous tombez de l'ultime arbre blanc, abattues
Cà et là, n'importe où, dans l'allée aux statues
Couleurs des jours anciens, de mes robes d'enfant,
Quand les grands vents d'automne ont sonné l'olifant
Et vous tombez toujours, mélant vos agonies,
Vous tombez, mariant pales, vos harmonies
Vous avez chu dans l'aube au sillon des chemins;
Vous pleurez de mes yeux, vous tombez de mes mains
Comme des larmes d'or qui de mon coeur s'égouttent,
Dans mes vingt ans déserts vous tombez toutes, toutes
Emille Nelligan